Vous le savez peut-être, je reviens tout juste d’Algérie, où je me suis rendue une dizaine de jours.
Je suis arrivée le 2 mai, pour la première fois depuis 2020.
Mes recherches ne s’étaient jamais arrêtées malgré les difficultés à obtenir un visa pendant la pandémie : je savais donc exactement où me rendre dès le lendemain de mon arrivée.
Je suis donc allée à Cherchell, ville natale de la famille paternelle d’Alia, à la recherche de sa grand-mère Zineb M. D’après le père d’Alia, c’est elle qui garde Alia depuis qu’il a été emprisonné en juin 2019 à cause du kidnapping.
Je voulais parler avec la grand-mère car je pensais pouvoir régler les choses à l’amiable avec elle, ou au moins voir Alia pour la première fois depuis décembre 2016.
Quelle ne fut pas ma surprise d’apprendre que la grand-mère était décédée plus tôt cette année ! Et quel choc quand je me suis rendue compte que personne dans la famille paternelle n’avait jugé bon de m’informer du décès de ma belle-mère…
Elle qui gardait pourtant ma fille selon leurs dires?
Que nenni. Le bruit court dans Cherchell qu’Alia n’a jamais vécu chez Zineb M, contrairement à toutes les déclarations du père devant la justice. Le bruit court même que son fils l’aurait tuée à force de faire venir la police chez elle alors qu’elle n’avait pas la petite, que tout ce stress l’aurait détruite. Les rumeurs sont un peu dramatiques en Algérie 😀
Après avoir parlé avec d’autres personnes, on s’est vite rendus compte que le Covid était passé par là, tout simplement, et que le grand âge et le diabète de la grand-mère ne lui ont laissé aucune chance.
Mais ça ne nous dit pas où est Alia…
A force de fouiner partout, nous avons fait parler de nous en ce deuxième jour de l’Aïd. Le frère aîné Mohamed B. a compris qu’on recherchait sa famille et nous a rejoints sur la place principale de Cherchell, entre la mer et la mosquée.

Il nous explique alors dans le plus grand des calmes que de toute façon, c’est lui qui garde Alia depuis le début, pas leur mère. Mes compagnons de galère et moi sommes choqués par les propos avoués… 2 fils qui laissent leur mère âgée faire face à la justice pour couvrir leur crime ? Quelle indignité.
Et l’aîné de repartir, confiant, dans ses explications ; il aurait soi-disant une procuration du père lui permettant d’avoir l’autorité parentale sur Alia. Malheureusement pour lui, s’il n’a pas ce fameux papier (qui n’existe probablement pas…) il n’a absolument aucun droit.
Qu’importe, nous sommes venus parler à l’amiable, alors nous maintenons le cap et tentons de régler cela en famille. Le frère, ne trouvant aucun argument à m’opposer, me dit alors qu’il ne « peut pas prendre la responsabilité de rendre Alia à l’un ou l’autre de ses parents en ce moment ». Pourquoi ? Il n’arrivera jamais à me l’expliquer.
Il maintient sa version initiale, de quand nous avions parlé la première fois l’année passée : il ne me laissera voir Alia que lorsque je serai de nouveau avec son frère, et qu’il sera sorti de prison. Sans cela, il ne peut pas « prendre cette décision. »
Si vous trouvez cela bizarre, moi non. Le père biologique n’ayant pas de mariage en Algérie avec moi, il n’a aucun droit sur Alia dans son propre pays, il n’en a qu’en France. Si je me remets avec lui et accepte le mariage, il lui sera plus facile de récupérer au moins un droit de visite et l’autorité parentale pour notre fille en Algérie. Mais il faut aussi qu’il sorte de prison.
Rien n’arrête leurs rêves, les pauvres.
En gros, je suis à leurs yeux l’outil pour que le géniteur puisse obtenir ce qu’il n’a pas : sa liberté et des droits sur Alia. Et elle est leur outil pour me faire faire ce qu’ils demandent, puisque je tiens plus à elle qu’ils ne le font.
Alia (#aliabouklachi) est officiellement devenue l’otage de son père et de son oncle.
Quant à sa santé, on n’aura eu aucune information. L’oncle confirme qu’il sait qu’elle a besoin de soins suite à son opération en 2015, mais il ne lui en a procuré aucun. Il sait qu’elle doit aller à l’école mais refuse de dire si elle est scolarisée. Il sait qu’elle doit parler à sa mère mais refuse de me laisser approcher.
Pour résumer, Alia vit toujours dans une bourgade de la wilaya de Tipaza, on ne sait pas trop où, ni trop avec qui, ni trop comment elle va. Mais il faudra s’en contenter tant que les deux fils aînés de la défunte Zineb M ne seront pas revenus à la raison.
Je ne suis malheureusement pas en mesure de demander un autre visa rapidement, mais dès que je pourrai retourner en Algérie, je continuerai à chercher Alia et à tenter de la voir, au moins à l’amiable.

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Article initialement paru le 12/05/2022

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