Aujourd’hui est un vendredi littéraire !
Le mois dernier, je vous parlais du premier témoignage de Marie-Claire ici, mais aujourd’hui, attaquons-nous aux grand noms du milieu de l’enlèvement parental : les Mahmoody.
Betty Mahmoody, le précuseur en la matière
Vous connaissez probablement Betty Mahmoody, autrice du best-seller Jamais Sans Ma Fille (Not Without My Daughter) dont a été tiré un film au début des années 1990. Son témoignage en version originale date de 1987, et rencontre un tel succès qu’il paraît traduit en Français dès 1988.



Betty Mahmoody nous y explique comment elle a été retenue par son mari contre son gré avec leur fille de 6 ans en Iran au milieu des années 1980, une période particulièrement difficile pour le pays. Elle n’y aborde par ailleurs pas que sa situation familiale, mais peint aussi un tableau frappant de la situation géopolitique de l’époque.
Le témoignage de Mahtob Mahmoody
Mais aujourd’hui, je ne veux pas tant vous parler de ce livre, que vous connaissez certainement déjà : je préférerais m’attarder sur le livre de Mahtob. Alors parlons, si vous le voulez bien, de Vers La Liberté (My Name Is Mahtob : A daughter’s Memoir), sorti en Français en 2013.
Mahtob Mahmoody, vous l’aurez compris, est l’enfant de Jamais Sans Ma Fille. Elle avait 6 ans lors du rapt, elle est désormais adulte. Elle nous livre, des années après sa mère, sa version de l’enlèvement (et pas que!).
Son livre débute avec sa naissance, racontant le début de sa vie aux Etats-Unis, avec sa famille. Viennent ensuite « les vacances » en Iran qui, au lieu de durer 2 semaines, s’éterniseront pour devenir de longs mois. On y découvre avec tristesse les états d’âme d’une écolière désorientée qui souhaite deux choses plus que tout : que sa mère soit avec elle en bonne santé… et rentrer aux Etats-Unis. Lorsque sa maman lui propose de s’enfuir, elle accepte avec très peu de regrets, avant de nous faire le récit d’une évasion laborieuse et effrayante.
Et son témoignage ne s’arrête pas là, ce n’est au contraire que le début : Mahtob a 7 ans lorsqu’elle retrouve son pays de naissance, sa famille maternelle et un environnement dépourvu de bombes.
Mahtob, alors renommée Mandy Smith pour sa sécurité et celle de ses amis, nous décrit ensuite sa vie telle qu’elle l’a vécue et sa reconstruction telle qu’elle l’a ressentie.
On la suit à l’école, puis au lycée, et enfin à la fac, avant de la voir rentrer dans la vie professionnelle. On apprend comment une enfant qui a vécu l’enfer du rapt parental parvient finalement à reprendre une vie qui semble si normale.
Le témoignage va, de fait, plus loin dans le temps que celui de sa mère puisqu’il continue jusqu’aux 32 ans de la narratrice, s’arrêtant ainsi dans les années 2010.
On voit donc la vie de Mahtob dans sa totalité, il ne s’agit pas que du récit de l’enlèvement. Et on a le bonheur de constater combien elle a réussi à avancer malgré la peur qu’elle avait de son kidnappeur, même une fois adulte.
En quoi le témoignage de Mahtob a-t-il sa place aujourd’hui dans le milieu du rapt parental
J’ai apprécié découvrir le point de vue de Mahtob sur son rapt, sur sa vie, sur ses avancées.
Je voulais connaître le point de vue de l’enfant lors d’un kidnapping. Je connais déjà très bien le point de vue du parent protecteur, puisque je partage ce rôle avec Betty Mahmoody. Mais à l époque où j’ai lu Vers La Liberté, je n’avais encore jamais entendu d’enfant rapté s’exprimer sur le sujet. (J’ai lu ce livre bien avant les autres : c’est en réalité le premier item de ma collection macabre de livres sur le rapt parental).
Et Mahtob ne déçoit pas. Elle nous explique tous ses dilemmes, les uns après les autres, avec le recul et la lucidité d’une personne qui a guéri.
Les sentiments sont tellement emmêlés, pour des raisons évidentes (comment choisit-on entre sa mère et son père, comment choisit-on entre ses deux cultures?), que j’étais impatiente de voir comment la Mahtob-enfant avait vécu cela. Elle a fait face à des situations qu’aucun adulte ne voudrait affronter, et pourtant, elle s’en sort. Elle s’en sort très bien.
J’ai aimé lire les débats intérieurs, les sentiments mitigés, les décisions qu’on doit prendre sans vouloir les prendre, et surtout, j’ai aimé voir que c’était possible.
On ne voit pas dans ce livre l’histoire d’une enfant seule, mais bien l’histoire d’une enfant aidée par sa famille, et en particulier sa mère. Cette dernière a su faire preuve d’un tact incroyable dans chaque situation difficile, à chaque tournant dangereux de leurs vies. Elle a réfléchit à tout, pesé le pour et le contre pour chaque instant de la vie de Mahtob, afin de l’aider au mieux à vivre la vie à laquelle elle avait droit.
Avoir pu suivre Mahtob jusqu’à sa vie adulte a quelque chose de rassurant pour moi qui suis la mère d’une enfant kidnappée.
Cela me donne l’espoir qu’Alia parviendra à se reconstruire, malgré tout le mal que lui fait actuellement sa famille paternelle. Cela me donne l’espoir qu’elle saura voir la vérité sur son kidnappeur lorsqu’elle aura guéri. Cela me donne l’espoir qu’elle pourra vivre une belle vie, malgré l’horreur de son enfance.

Sur ces bonnes paroles, je vous remercie une fois de plus pour votre soutien, et je vous souhaite un bon weekend !
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Un soulagement, en effet, de penser que, peut-être, un jour, Alia pourra se remettre des blessures de son enfance… car être privée de sa mère pendant de si longues années, qu’est-ce d’autre qu’une terrible blessure ?
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